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Un grand tour dans la poche, mais Kuss va-t-il vraiment devenir un leader ?

Tour d’Espagne (Vuelta 2023)

Vainqueur de la Vuelta 2023, alors que personne ne l’attendait vraiment au départ, Sepp Kuss fait désormais partie de la caste des vainqueurs de Grand Tour. De quoi changer la carrière de l’Américain ? Le natif de Durango (Colorado) en a clairement le talent mais reste à savoir s’il supportera une pression de leader qu’il n’a jamais vraiment connue sur les routes espagnoles.

« Sepp aussi peut peut-être gagner ». La phrase anodine de Primoz Roglic au Grand Départ de Barcelone se sera révélée être une prédiction bien involontaire. Car, oui, Sepp Kuss a bel et bien remporté ce Tour d’Espagne 2023.
Inattendu au départ, si ce n’est dans le rôle d’équipier majeur de Roglic et Jonas Vingegaard, l’Américain s’est offert sur les routes espagnoles le plus grand succès de sa carrière, au terme de trois semaines assez improbables et qui lui auront permis d’intégrer le cercle des vainqueurs de Grands Tours. A 29 ans, le natif de Durango change encore de dimension avec ce maillot rouge ramené à Madrid. Ponctuellement ou va-t-il définitivement basculer du côté des coureurs qui visent le général ?

Le Giro est taillé pour ses qualités
Sur le papier, il n’y a aucun doute concernant la capacité de Sepp Kuss à jouer les premiers rôles sur les plus grandes courses. Depuis plusieurs années parmi les meilleurs grimpeurs du monde, même s’il se mettait souvent au service de ses leaders, l’Américain a aussi montré à l’occasion de cette Vuelta une capacité à limiter la casse dans les contre-la-montre (13e à Valladolid à 1’29’’ de Ganna, devant Enric Mas par exemple) mais aussi à prendre les bons coups dans les bordures, que ce soit vers Javalambre ou Collado de la Cruz de Caravaca. En termes de talent, Kuss a tout notamment pour gagner des courses par étapes.On pense notamment aux épreuves d’une semaine du World Tour, que ce soit l’UAE Tour (5e cette année), le Dauphiné (10e en 2020), le Tour de Catalogne ou de Romandie, qui semblent tous taillés pour ses qualités. Mais les Grands Tours restent son rêve.
« Bien sûr, je voulais être un coureur qui vise le général d’un Grand Tour, expliquait Kuss dans Cyclingnews. Mais ce n’est pas fait pour tout le monde ». Qu’il se rassure, c’est fait pour lui. La Vuelta remportée, viser le maillot rose sur le Tour d’Italie est également une ambition que l’Américain peut avoir, tant le Giro présente régulièrement un parcours (très) montagneux. Mais le pourra-t-il tant que Jonas Vingegaard et surtout Primoz Roglic sont au sein de la Jumbo-Visma ? Rien n’est moins sûr. Bien qu’il ait eu la préférence de ses dirigeants sur cette Vuelta, le Danois est clairement le n°1 et, jusqu’à preuve du contraire, le Slovène aura sans doute la priorité aussi pour les Grands Tours. Et c’est sans doute le premier frein pour Sepp Kuss.

Être leader, ça serait un fardeau pour moi
Se battre pour le top 5 voire pour le podium du Tour de France semble également possible, lui qui adore les longs cols de juillet et qui a montré sur cette Vuelta être capable d’échapper aux nombreux pièges. Mais cela passera forcément par un départ de la Jumbo-Visma, tant il semble impossible de voir Jonas Vingegaard faire l’impasse sur la Grande Boucle dans les prochaines années. Sepp Kuss loin de la Jumbo-Visma, c’est presque comme une gaufre sans chantilly : ça reste bon mais ce n’est plus exceptionnel. Et puis, surtout, est-ce vraiment ce dont rêve l’Américain ?
Car c’est finalement la première question à se poser. Viser un Grand Tour ouvertement, Sepp Kuss ne l’a encore jamais fait. Il n’a jamais eu à assumer le statut de leader, ni au départ, ni même en course. Oui, l’Américain a porté le maillot rouge pendant plus de dix jours sur cette Vuelta 2023 mais les coureurs qui assumaient le poids de la course, c’était bien Jonas Vingegaard et Primoz Roglic. Un élément primordial. « Quand c’est imprévisible, ça évite d’avoir une pression mentale alors que, quand tu dois te concentrer dessus, tu ne penses qu’à ça, avouait Kuss dans Sud-Ouest en juillet. Être un leader, pour Primoz ou Jonas, ce n’est pas vraiment un fardeau, alors que ça le serait pour moi ». Un fardeau peut-être, mais pas un frein à ses chances de gagner. D’autant qu’il mérite d’avoir sa chance.

La Jumbo-Visma peut-elle se permettre d’avoir Kuss leader ?
« S’il le veut, il mérite clairement d’avoir d’autres chances, assure Jonas Vingegaard, son dauphin sur ce Tour d’Espagne. J’espère pour lui qu’il le souhaitera, même si ça veut dire que je vais peut-être perdre un super équipier pour la montagne ». Et c’est finalement le principal point d’interrogation sur la stratégie à venir de la Jumbo-Visma dans les années à venir. A 29 ans, Sepp Kuss n’a plus énormément d’opportunités à gâcher mais reste un rouage primordial dans la machine de guerre néerlandaise sur les Grands Tours. La Jumbo-Visma peut-elle se permettre par exemple de mettre l’Américain comme leader sur le Giro en risquant de voir arriver en méforme son lieutenant de luxe sur le Tour ? C’est une question sur laquelle la formation néerlandaise est sans doute déjà en train de se pencher. À condition, bien sûr, que Sepp Kuss en ait réellement envie. Mais le contraire nous surprendrait.

Pour finir, il convient de rappeler que l’année 2023 de Sepp Kuss débute avec l’UAE Tour, dont il prend la 5e place du classement général. Il assiste ensuite Primož Roglič sur ses victoires lors du Tour de Catalogne et du Tour d’Italie, avant de prendre le départ du Tour de France en soutien au vainqueur sortant Jonas Vingegaard. Il se révèle décisif sur nombre d’étapes de montagne pour son leader danois, notamment l’étape 5 où Vingegaard prend 53 secondes à Tadej Pogacar. Il le protège ensuite tout du long, et intègre même le top 10 du classement général au soir de la 14e étape, mais termine le Tour à la 12e place en raison d’une violente chute lors de la 20e étape, qu’il termine le visage en sang.

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