Le désormais ex-sélectionneur national de handball, Yacine Bouakkez, a annoncé sur les ondes de la Radio algérienne qu’il quitte officiellement son poste d’entraîneur de la sélection féminine. Il revient en détails sur les raisons de son départ, en expliquant le différend qu’il a avec l’actuelle présidente de la Fédération algérienne de handball (FAHB), Karima Taleb.
« J’avais un sérieux problème dans la rotation des joueuses »
Interrogé, dans un premier temps, sur le bilan de la participation algérienne à la CAN en RDC, et cette 8e place au classement général, Bouakkez dira :
« Dans l’ensemble, je trouve que c’était assez correct, avec un bilan un peu mitigé dans la mesure où on aurait pu mieux faire. On a perdu 3 joueuses assez rapidement, ce qui a été un sérieux problème pour moi dans la rotation. Cela a été un peu difficile, notamment avec l’enchaînement des rencontres. J’ai vu toutefois des choses intéressantes. De toute manière, l’objectif était clair avant même l’entame de la CAN, c’est-à-dire se qualifier dans un premier temps pour les quarts de finale et après aller chercher le bonus si possible. »
« C’était difficile de mettre un projet de jeu pour cette raison »
Pour ce qui est de la préparation qui a précédé la compétition africaine, Bouakkez a fait savoir qu’il n’a pas eu le temps suffisant pour préparer ses joueuses : « Depuis que je suis arrivé, j’ai constaté qu’il y avait certaines choses qui ne fonctionnaient pas bien. Déjà, sur le plan de l’effectif, il y avait une grande différence de niveau entre les joueuses. C’était difficile de mettre en place un projet de jeu élaboré pour aller vraiment vers la performance. »
« Je reste persuadé qu’il y avait des joueuses meilleures en Algérie, mais… »
L’autre point abordé, c’est celui de la liste des joueuses sélectionnées. Bouakkez a confié qu’il n’a pas eu le temps qu’il fallait pour effectuer une large prospection à l’échelle nationale : « Il fallait chercher des joueuses un peu partout et pour la cohésion, c’était très difficile pour moi d’avoir une vue d’ensemble de toutes les joueuses d’Algérie. Je dirai aussi que j’ai manqué de temps pour aller chercher d’autres joueuses, même si je reste persuadé qu’il y avait des joueuses meilleures sur certains postes et que je n’ai pas pu voir ou qu’on ne m’a peut-être pas laissé voir, je ne sais pas ! Mais le constat est qu’en Algérie, on avait des joueuses qui avaient commencé le championnat tardivement. Des joueuses donc qui n’étaient pas prêtes physiquement. C’était en fait très compliqué de pouvoir sélectionner les joueuses d’Algérie dans de bonnes conditions. »
« L’instabilité a eu un impact direct sur les performances de la sélection »
Aux yeux du désormais ex-sélectionneur, le plus gros problème reste l’instabilité que connaît la fédération : « Je dois dire qu’au-delà du problème rencontré sur le terrain, l’instabilité que connaît la Fédération algérienne a un impact direct sur les performances de la sélection. Il y a un manque de coordination avec les clubs. La problématique reste toujours cette instabilité qui empêche de travailler sur le long terme. On est toujours là à créer le déséquilibre, alors que c’est le contraire qu’il devrait se produire. On doit chercher un équilibre. C’est ce que j’ai ressenti. De plus, je dois dire qu’on doit penser à l’intérêt de la sélection et ne pas être lié à l’histoire d’un club. Un président de club doit être neutre. »
« J’étais venu pour un projet à long terme »
Avant d’ajouter dans la foulée : « Au début, j’étais d’accord pour le changement. J’étais venu avec l’intention de ramener une autre philosophie du handball. On était prêts à développer et à améliorer le niveau des athlètes. On voulait grandir avec cette équipe. D’après ce que j’ai vu au Championnat d’Afrique, je peux dire qu’on avait le niveau pour passer en demie et même aller chercher cette qualification au Mondial. Mais il faut savoir aussi qu’on ne peut pas faire du neuf avec du vieux. Et c’est peut-être la problématique qu’on rencontre depuis plusieurs années, c’est-à-dire qu’on nous demande de faire du neuf avec du vieux et de garder le même fonctionnement. Mais il est où le changement ? Si on veut faire évoluer des choses comme l’a fait la Tunisie ou l’Égypte, il faut changer les mentalités. J’étais venu pour un projet, mais malheureusement, il m’est impossible de poursuivre dans ces conditions. »
« J’ai quitté mon poste pour ces raisons ! »
Par la suite, Yacine Bouakkez a annoncé officiellement qu’il n’est plus le sélectionneur national : « J’ai demandé à quitter prématurément le groupe, parce qu’il s’est passé certaines choses que je ne pouvais pas accepter, qui sont au-delà de mes valeurs. Alors oui, aujourd’hui, je ne suis plus lié à ce projet-là, parce qu’on n’est pas sur la même longueur d’ondes, et il y a une image à respecter qui est celle de l’Algérie et de l’Équipe nationale et, pour moi, elle n’a pas été respectée. Il n’y a pas cette compatibilité avec la présidente, et sa façon de penser diffère de la mienne. On n’a pas la même vision du handball. »
« Il y a également des raisons extra-sportives »
Yacine Bouakkez a aussi fait savoir qu’il y avait d’autres raisons extra-sportives qui l’ont poussé à jeter l’éponge : « En pleine compétition, on a fait une réunion et on a essayé de m’expliquer le handball. Je me suis dit, bon, c’est la première fois que ça arrive, je peux accepter cela. Mais cela a récidivé une autre fois. Et là je ne peux plus l’accepter. C’est la raison pour laquelle je dis qu’on n’a pas la même vision du handball. Si on parle de projet, donc il ne devrait pas y avoir l’obligation de résultats. Et par la suite, on me demande d’aller chercher des résultats. Je trouve que ce n’est pas cohérent. J’estime qu’on devait travailler dans la sérénité. C’est pour cela que je préfère arrêter. Je suis très professionnel et je préfère arrêter plutôt que de perturber les joueuses. »
Propos recueillis par A. A.