L’aérodynamique, les dimensions et les moteurs des nouvelles voitures rendent cruciale l’intégration entre le châssis et l’unité de puissance. Le championnat 2024 bat son plein, mais les équipes se tournent déjà vers 2026, année de l’arrivée des nouveaux véhicules. Dans trois mois, la FIA publiera la version définitive du règlement technique, permettant aux équipes de débuter le développement aérodynamique des nouvelles monoplaces dès le 1er janvier 2025. Adrian Newey, qui vient de signer avec Aston Martin, a déjà une vision claire sur l’un des aspects essentiels de cette transition.
Le défi
Lors de la conférence de presse pour annoncer son arrivée chez Aston Martin, Adrian Newey a été interrogé sur l’aspect principal de son travail en vue de 2026. Il a déclaré : « Nos trois départements principaux sont l’aérodynamique, la conception mécanique et la performance du véhicule. Mon attention sera portée à assurer une collaboration étroite entre ces départements et Honda, côté unité de puissance. L’intégration entre la PU (unité de puissance) et le châssis sera plus cruciale que jamais. Notre objectif est de développer un projet harmonieux. » L’intégration entre la coque et le moteur avait déjà gagné en importance avec l’arrivée des règlements actuels. Depuis 2022, les monoplaces ont été débarrassées de nombreuses appendices aérodynamiques complexes montées de part et d’autre du cockpit, qui jusqu’en 2021 aidaient à protéger le plancher des turbulences générées par les roues avant. Avec les nouvelles voitures, l’attention s’est déplacée vers la carrosserie, sculptée pour créer des zones de haute pression qui éloignent les turbulences du plancher. Il n’est donc pas surprenant que, lors des deux premières saisons, les équipes aient fréquemment modifié les pontons et le capot moteur pour parvenir au schéma optimal. En effet, plus les composants internes comme l’unité de puissance, le système de refroidissement et l’électronique sont compacts, plus la liberté de modelage de la carrosserie est grande, améliorant ainsi l’efficacité aérodynamique et l’isolation du plancher contre les turbulences. Ce principe restera valable en 2026, avec encore plus d’importance.
Les nouveaux règlements
L’une des raisons de l’importance accrue de l’intégration entre châssis et unité de puissance est que les Formule 1 de 2026 auront un fond plus plat que les actuelles. Le pourcentage d’appui généré par l’effet de sol restera élevé, mais les canaux Venturi seront moins incurvés. Nikolas Tombazis, directeur du département des monoplaces à la FIA, a expliqué ce choix : « L’une des raisons pour lesquelles nous nous dirigeons vers un fond plus plat est de permettre une élévation du train arrière, ce qui facilitera les réglages mécaniques des suspensions et éliminera le rebond. Les voitures actuelles roulent très près du sol, tandis que celles d’avant 2021 étaient bien plus hautes. Nous voulons une solution intermédiaire, avec une hauteur modérée. »
Avec le retour à des configurations plus inclinées et des hauteurs de caisse plus élevées, le fond sera donc plus éloigné du sol, et donc plus exposé aux turbulences extérieures. L’aérodynamique des nouvelles monoplaces est également conçue pour attirer les turbulences des roues avant vers l’intérieur, les rapprochant du fond pour réduire les perturbations pour la voiture suiveuse. Une carrosserie efficace pour protéger le fond des turbulences des roues sera donc cruciale, renforçant l’importance de l’intégration entre le châssis et l’unité de puissance. Cependant, les dimensions réduites des nouvelles voitures compliqueront le conditionnement des composants internes, avec un empattement raccourci de 3,6 à 3,4 m et une largeur passant de 2,0 à 1,9 m. Par ailleurs, l’élément MGU-H de l’unité de puissance disparaîtra, mais les composants du système hybride seront soumis à une puissance trois fois supérieure, augmentant également leur taille. Le poids minimum de la batterie passera de 20 à 35 kg, tandis que le moteur électrique passera de 7 à 16 kg.
Des travaux déjà en cours
Adrian Newey reste toutefois parmi les meilleurs pour trouver les solutions d’emballage les plus efficaces. En 2011, par exemple, il avait convaincu les dirigeants de Red Bull de monter la batterie du KERS dans la zone fortement sollicitée de la boîte de vitesses, avançant ainsi le moteur pour obtenir un arrière de voiture plus fin, avantageant l’aérodynamique du diffuseur. Lors d’un épisode du podcast « Talking Bull », en 2023, Newey révélait déjà que Red Bull travaillait en vue de 2026 sur l’intégration du châssis : « Du point de vue du châssis, nous étudions différentes façons d’intégrer le tout. Rob Marshall s’en charge, et il fait un excellent travail. » Rob Marshall a, depuis, rejoint McLaren, où il devient une ressource précieuse pour l’équipe de Woking dans la perspective des nouveaux règlements.
Djaffar KHODJA