Roland-Garros 2023: FRITZ, MONFILS, MEDVEDEV… POURQUOI LE PUBLIC DE ROLAND EST-IL PLUS CHAUD QU’AVANT ?
Après une petite semaine de Roland-Garros 2023, le public a déjà beaucoup fait parler de lui. Évidemment dans le cas de Taylor Fritz jeudi soir mais aussi dans d’autres, comme pour Gaël Monfils mardi en night session. De ce côté, il y a une vraie évolution à noter et les raisons pour l’expliquer sont nombreuses. Nous en avons choisi trois : le Covid, la Coupe Davis et les night sessions.
Taylor Fritz ne s’est pas fait que des amis jeudi soir sur le Suzanne-Lenglen en invitant une foule hostile à se taire après son succès sur Arthur Rinderknech. Sebastian Baez n’avait lui montré aucun signe d’agacement quand le public du Philippe-Chatrier se montrait très exubérant pour soutenir Gaël Monfils dans son opération survie. L’un comme l’autre ont été « victimes » d’un public de Roland-Garros qui fait un peu plus parler de lui cette année que les précédentes.
Est-il pour autant différent de celui des autres Grands Chelems ? Pas vraiment tant l’Open d’Australie par exemple a lui aussi connu des polémiques dans ce domaine ces dernières années. Le public français a-t-il été un jour aussi chaud ? Oui. C’était évidemment vrai en Coupe Davis mais aussi à Bercy où les tribunes, dissipées au possible, étaient complètement différentes de celles de Roland-Garros dans les années 80 ou 90. Voici trois raisons qui pourraient expliquer pourquoi l’attitude de la foule du Grand Chelem parisien a évolué.
LE COVID A CHANGÉ LA DONNE
L’édition 2023 est la deuxième du retour à la normale pour Roland-Garros. Ce n’est pas un hasard si depuis la pandémie, partout dans le monde on parle un peu plus du public et de son attitude dans le tennis. A sa façon, le Covid a confirmé, s’il était nécessaire, que le public jouait un rôle dans le spectacle qu’est le sport. Roland-Garros ne déroge pas à la règle, au contraire.
Il y avait eu 2020, jouée dans des conditions tristes à pleurer, sous la grisaille automnale et devant un millier de spectateurs par jour, puis 2021 disputée aux dates « normales » mais avec une jauge encore réduite (5000 spectateurs en début de tournoi). Roland-Garros a manqué au public français comme l’Open d’Australie aux Australiens ou l’US Open aux Américains. Depuis qu’il est revenu à plein dans les tribunes, le public a évolué. A-t-il besoin de profiter davantage de l’événement après en avoir été privé ? Sans doute. Inconsciemment, mesure-t-il plus la chance qu’il a d’en être acteur ? Peut-être.
LA COUPE DAVIS MANQUE AU PUBLIC FRANÇAIS
Et si la disparition de la Coupe Davis, en tout cas sa formule classique, enterrée en première classe fin 2018, avait bouleversé le comportement du public français à Roland-Garros et Bercy ? C’est fort possible. La France, pays historique de la Coupe Davis, restait très attachée à cette épreuve. Les trois finales jouées à Lille devant plus de 25 000 personnes pendant trois jours entre 2014 et 2018 avaient confirmé l’appétit des supporters tricolores pour ces folles ambiances.
Sevrés de ces rendez-vous précieux en forme de communion, ils se sont retrouvés orphelins. En Coupe Davis, le public est plus que jamais acteur. Il devient un personnage central. Les joueurs ne sont pas là que pour eux, mais pour défendre leurs couleurs nationales. Ils jouent donc, aussi, pour le public. Ce dernier peut faire vivre l’enfer à l’adversaire et, si tout n’est pas permis, on s’y autorisait des choses en tribunes, dans la manière de s’exprimer et dans l’intensité de cette expression, que l’on retrouvait beaucoup plus rarement dans un tournoi classique.
Le public français, dans son malheur, a beaucoup de chances puisqu’il est le seul pays, avec les Etats-Unis, à posséder au calendrier à la fois un Grand Chelem et un Masters 1000. Conséquence, dans ces deux tournois, il a opéré un transfert. Roland et Bercy sont devenus sa nouvelle Coupe Davis. L’impact de foule ne peut être le même qu’en Coupe Davis, où un seul match peut modifier le destin d’une confrontation. La foule ne permettra jamais à un joueur français de gagner sept matches à Roland-Garros. Mais certains jours, elle peut tout changer. Certains soirs plus encore.
LES NIGHT SESSIONS ONT ÉLARGI LE CADRE
Voilà trois ans désormais que Roland-Garros se joue aussi de nuit. Grâce aux projecteurs et au toit installés sur le court Philippe-Chatrier, l’organisation a pris la roue de Melbourne et Flushing Meadows pour proposer des rencontres en prime time. L’atmosphère évidemment particulière de ces matches, uniques par essence, a un peu élargi le champ de ce qu’il est possible de faire dans les tribunes d’un match de tennis.
Venu pour assister à une seule rencontre, le public en veut pour son argent, quitte à se montrer plus extrême dans son soutien à un tel ou tel joueur, surtout s’il est Français. Face à Sebastian Baez, Gaël Monfils a ainsi pu compter sur la foule pour le maintenir à flots ou lui permettre de récupérer quelques secondes de plus entre chaque point.
Dans ces matches, plus de choses sont permises. Et puisqu’elles le sont là, « l’autre public », celui de la journée se sent, peut-être, lui aussi en droit d’être un peu plus bruyant, un peu plus chauvin, un peu plus tout en fait.