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TENNIS – Wissal Boudjemaoui (Balle d’Or) : « Le sport féminin reste toujours un tabou dans certaines régions du pays » 

Wissal Boujemaoui a débuté à l’âge de 5 ans sa carrière sportive, dans la catégorie des Poussines, chez la coache Sarah Chaki, au sein du club de Haï Salam, à Oran, où elle apprend vite les rudiments de la discipline.

Propos recueillis par Sadek Belkheir

L’amour du tennis lui a été transmis par sa mère, une ancienne tenniswoman. Dès sa deuxième année de pratique, Wissal Boudjemaoui commence à focaliser les regards, eu égard à ses grandes aptitudes techniques et à une constante progression. Après le départ de son entraîneur pour l’Espagne, elle change de club et intègre la formation de la Balle d’Or, après un bref passage au club Enasr. Elle commence alors à décrocher des titres locaux et régionaux, suscitant ainsi un intérêt croissant. Ses aptitudes techniques et physiques, mais aussi et surtout son sérieux en besogne, lui ouvrent les portes de l’Equipe nationale des jeunes catégories. Mais Wissal va vite se retrouver face à de grosses difficultés, du fait d’un manque de moyens au sein de son club. Cette jeune athlète douée sera en effet confrontée à des entraves pouvant mettre en péril sa carrière sportive. Fort heureusement, ses parents vont inverser le cours des choses en décidant de la prendre totalement en charge afin qu’elle ne se décourage pas.

Sollicitée par nos soins après son sacre à l’ITF juniors d’Oran, elle a accepté volontiers d’ouvrir son cœur aux lecteurs de Planète Sport, à l’occasion de la Journée internationale de la Femme.

Tout d’abord, parlez-nous de votre belle consécration à l’ITF juniors d’Oran ?

Après avoir raté le sacre à l’ITF juniors de Hydra, je me suis lancé le défi de remporter celui d’Oran. J’ai alors effectué une bonne préparation sous la coupe de mon entraîneur Djilali Laslah, que je remercie beaucoup au passage pour tout ce qu’il fait afin que je garde une constante progression et que je reste au top de ma forme. En totale confiance, j’ai bien géré mes matchs en quart et demi-finale, pour finir par accéder en finale. J’ai tenu à gagner ce match et, au bout du compte, j’ai réussi à m’adjuger le trophée face à une concurrente de Tunisie qui m’a causé des difficultés au 1er set, mais ma détermination était grande et m’a permis d’en venir à bout. Je remercie fortement mon coach Djilali Laslah pour son bon travail de qualité, surtout pour m’avoir conditionnée, ainsi que mes parents, qui n’ont jamais cessé de me soutenir. Djilali Laslah est un coach expérimenté et ambitieux dans son travail. Il active au sein du club la Balle d’Or, loin des feux de la rampe mais avec force et dévouement, pour la promotion et le développement de la discipline. Il est aussi mon entraîneur en Equipe nationale. Ce coach continue d’ailleurs à m’encadrer, malgré le manque de moyens ».

Un commentaire sur votre participation aux derniers Championnats d’Afrique des moins de 16 ans, en Tunisie ?

J’ai en effet pris part aux derniers Championnats d’Afrique des moins de 16 ans, à Sousse (Tunisie) où j’ai décroché la 3e place, toujours sous la coupe de mon entraîneur Djilali Laslah. Après quoi, je suis restée en Tunisie pour participer à d’autres tournois internationaux à Bizerte, Kelibia et Carthage. Malheureusement, j’ai contracté une blessure à Kelibia en raison d’une fatigue musculaire résultant d’une forte charge de travail et de la nature des terrains de tennis en acrylique et en Green-Set auxquels je n’étais pas habituée, moi qui n’avais évolué que sur les terrains en terre battue d’Algérie. Mais je n’ai que 16 ans et peux donc progresser davantage et mieux faire encore ».

Que vous faut-il pour aller toujours de l’avant ?

J’ai des aptitudes pour progresser et mieux faire que cette 3e place en Tunisie. Après ma consécration à l’ITF juniors d’Oran, l’objectif sur lequel je me concentre maintenant, ce sont les prochains Championnats d’Afrique où je compte décrocher le sacre continental. Ma volonté est grande, mais pour être au top de ma forme, il me faut des moyens conséquents et de nombreuses participations à des tournois internationaux et à des ITF juniors à l’étranger, vu que ces tournois ne s’arrêtent jamais. Il faut savoir que la Fédération algérienne de tennis (FAT) ne m’a prise en charge jusqu’ici que pour deux tournois, ceux du Sénégal et de Sousse. Par contre, mes autres participations, au Cameroun et en Tunisie (à Bizerte, Kelibia et Carthage), étaient à la charge de mes parents, toujours disposés à financer mes autres tournois. Pour l’heure, mon entraîneur fait tout pour mes entraînements et pour m’encourager à ne pas baisser les bras pour aller de l’avant. Je tiens à faire savoir que, bien que les moyens de notre club, la Balle d’Or, soient très limités, nous nous efforçons pourtant de développer la discipline et de faire émerger des jeunes talents. Et en ce qui me concerne, je ne représente pas uniquement mon club, mais aussi et surtout les couleurs nationales. Et en cette qualité, je crois qu’une sérieuse prise en charge par l’instance fédérale est plus que nécessaire.

Un mot sur votre club, la Balle d’Or ?

C’est un club qui nourrit l’ambition de développer la discipline et qui compte en son sein de nombreux adhérents dont des internationaux. Le seul gros problème de notre club, c’est le manque de moyens et de considération. Le club la Balle d’Or était dirigé par un jeune président, Ahmed Benyahia. A Oran il existe des clubs, certes, mais seuls trois d’entre eux activent pour le développement du tennis. Fort heureusement, nous avons la chance de disposer d’un entraîneur de la trempe de Djillali Laslah, qui œuvre inlassablement pour le développement du tennis et me permet, à moi, de progresser. Je ne sais d’ailleurs comment le remercier pour son abnégation et les efforts considérables qu’il ne cesse de déployer. C’est le seul entraîneur capable d’assurer une formation de qualité et, du coup, l’émergence de jeunes talents à l’international ».

Que pensez-vous du sport féminin en Algérie ?

Le sport féminin, malgré le bon vouloir pour son déploiement à travers le pays, reste toujours un tabou dans certaines régions et au sein de certaines familles, qui refusent toute pratique sportive à leurs filles. Les hautes instances sportives nationales font tout pour le développement du sport féminin mais freins et insuffisances subsistent. Malgré mon jeune âge, je sais que le tennis féminin a connu de bons moments, voire ses heures de gloire par le passé. Mais aujourd’hui, il est confronté à une multitude de problèmes qui ont pour effet d’entraver son essor. C’est ainsi par exemple qu’il y a une énorme déperdition au niveau des féminines. Pourtant, on ne peut s’empêcher de constater que celles-ci font de bonnes choses et progressent malgré la culture négative de certaines mentalités rétrogrades qui les empêchent de s’adonner à la pratique sportive, notamment chez nous dans l’ouest du pays. Pour ma part, je suis tout simplement une miraculée, qui a la chance inouïe d’avoir une famille qui a une grande ouverture d’esprit et qui m’encourage à faire du tennis.

Quel message aimeriez-vous envoyer aux filles pour les inciter à la pratique sportive ?

Mon message s’adresse surtout aux filles qui restent cloîtrées chez elles, afin qu’elles pratiquent un sport, vu que le sport c’est aussi la santé. La femme doit être active et sportive. Il existe des disciplines qui conviennent mieux aux femmes, notamment le tennis, sans pour autant les contraindre à sortir de leur contexte féminin et familial ».

Et pour conclure ?

Je suis ambitieuse et déterminée à travailler d’arrache-pied pour toujours aller de l’avant. Je cherche sans cesse à améliorer mon top niveau et surtout mon classement mondial. Je vais entamer ce 2e ITF juniors avec la même motivation et la même volonté, en vue de décrocher le trophée. Mais il ne faut pas croire pour autant que j’oublie les Championnats d’Afrique, qui font partie de mes constantes préoccupations.

Merci à mes parents pour leur soutien indéfectible, à mon entraîneur Djilali Laslah, qui consent d’énormes efforts et consacre tout son temps pour me permettre d’améliorer mes capacités ». 

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