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Carlos Alcaraz, le coup de la panne

ATP Shangahai

Battu dès les 8es de finale à Shanghai mercredi, Carlos Alcaraz n’a pas atteint l’objectif qu’il s’était assigné lors de cette tournée asiatique : reprendre la première place mondiale à la Race. Mais au-delà de ce constat, le Murcien fait moins bonne impression cet automne. Paie-t-il physiquement l’addition d’une saison aussi remplie qu’exceptionnelle à son jeune âge ?

Il est rentré dans le rang. En tout cas depuis son triomphe extraordinaire à Wimbledon. Sur les deux premiers tiers de la saison, Carlos Alcaraz était le seul joueur au monde à pouvoir atteindre les mêmes cimes tennistiques que Novak Djokovic. Le seul d’ailleurs à l’avoir battu en Grand Chelem, au All England Club. Le Serbe et l’Espagnol étaient sur leur planète, les autres les regardaient de loin comme Alexander Zverev, écrasé par le Murcien en quart de finale de l’US Open, le constatait. Mais ces dernières semaines, ce n’est plus tout à fait le cas.
Si Djokovic a continué sur sa cadence infernale lors de l’été – titres à Cincinnati et à l’US Open, 13 victoires (en comptant la Coupe Davis), aucune défaite -, ce mois d’août a constitué une petite fracture dans l’année 2023 de « Carlitos ». A ce titre, ses statistiques sont éclairantes :
Jusqu’à Wimbledon : 6 titres en 10 tournois, 47 victoires en 51 matches soit 92 % de réussite
Après Wimbledon : aucun titre en 5 tournois, 16 victoires en 21 matches soit 76 % de réussite
Un autre constat saute donc aux yeux : Alcaraz a plus perdu lors des deux derniers mois que lors des sept premiers de la saison, ou plutôt six puisqu’il a manqué celui de janvier à cause d’une blessure. Le Murcien de 20 ans, qui compte 63 victoires en 2023, plus que quiconque, marque le pas. Manquerait-il donc d’essence pour finir la saison comme ce fut le cas l’an dernier quand une déchirure musculaire aux abdominaux contractée au Rolex Paris Masters l’avait privé de son premier Masters ?

Il a déjà revu sa copie par rapport à 2022
Le consultant Alex Corretja n’écarte pas l’hypothèse, sans toutefois s’en inquiéter. « Sa saison est spectaculaire, c’est presque impossible de faire mieux. Et il arrivera un moment où il faudra qu’il choisisse ses tournois comme Djokovic, estime-t-il. Nous nous sommes habitués à voir Nadal, Djokovic et Federer empiler les Masters 1000 comme si de rien n’était, mais c’est plus normal pour lui de faire une demi-finale contre Sinner et d’être ensuite surpris par Dimitrov. Être à 100 % pendant 80 matches dans une année, c’est impossible. Et l’une des clés pour Alcaraz est de bien construire son calendrier en fonction des voyages, des entraînements, des changements de programmations et d’hôtels… »

A 20 ans, la capacité de récupération d’Alcaraz est évidemment plus rapide que celle du Serbe et il a moins de raisons de s’économiser. Mais sa blessure en début de saison et certains bandages arborés aux cuisses lors de l’été américain ont rappelé à quel point il était sur la corde raide. Reste que le Murcien n’ignore pas le problème et en a d’ailleurs déjà tenu compte puisque contrairement à la saison passée, il a fait l’impasse sur la Coupe Davis dans la foulée de l’US Open. Et si le problème, tout relatif soit-il, était donc à chercher dans la capacité d’Alcaraz à gagner et à trouver des solutions même quand il n’est pas à 100 % ? Contre Jannik Sinner à Pékin comme contre Daniil Medvedev quelques semaines auparavant à Flushing, le Murcien a eu toutes les peines du monde à encaisser la perte du premier set au tie-break. C’est peut-être dans cette absence de révolte mentale ou cette petite panique qu’il faut chercher l’axe de progression. Très en verve à Shanghai, Grigor Dimitrov lui a d’ailleurs posé un autre problème qu’il n’a pas su résoudre.

Devenu une cible, il est peut-être trop obsédé par le trône
« Dimitrov joue au tennis d’une manière un peu différente de ce à quoi les joueurs sont habitués sur le circuit. Il change les hauteurs de balles, en revers il peut varier en slice et il a un bon service. C’est un jeu bien plus varié que ce à quoi Carlitos est habitué. Je ne sais pas si c’est ce qui l’a surpris. Si Alcaraz joue à son meilleur niveau, il gagne 95% des matches, sauf quand les meilleurs se jouent entre eux à leur top. C’est bien pour Alcaraz de comprendre comment il peut battre, quand il n’est pas à son meilleur niveau, des joueurs qui varient autant que Dimitrov. Sa tournée asiatique n’est pas inquiétante. Je ne lui accorde aucune importance. Chaque tournoi, chaque semaine, chaque jeu est Tirer la sonnette d’alarme serait en effet bien prématuré. Avec une finale en Masters 1000, une demie en Grand Chelem et une autre demie en ATP 500 sur trois de ses quatre derniers tournois, le fléchissement d’Alcaraz ferait pâlir d’envie la plupart des joueurs du circuit. Mais justement, le prodige de Murcie est par définition hors norme, tellement sur ces deux dernières saisons qu’il a désormais une cible dans le dos. Chaque faux pas et chaque faille sont décortiqués par des adversaires qui ne rêvent que de l’accrocher à leur tableau de chasse.

Dans cette perspective, la course à la place de numéro 1 mondial a peut-être aussi trop pesé dans l’esprit du protégé de Juan Carlos Ferrero. S’il en a parlé comme d’un facteur de motivation, l’objectif a peut-être pris le meilleur sur le jeu lui-même. Moins libéré qu’à l’accoutumée ces derniers temps dans ses frappes, il a aussi semblé plus agacé, moins souriant en Chine, un relâchement qui fait habituellement sa force. Une occasion d’apprendre pour Alcaraz », abonde Alex Corretja. A 500 points de Novak Djokovic à la Race après cette tournée (il était à 770 longueurs avant), Alcaraz n’a donc pas repris la main. Mais s’il s’impose dans deux semaines à Bâle pour sa reprise, il se rapprocherait considérablement du Serbe avant l’enchaînement Bercy-Masters. En attendant, un peu de repos sera le bienvenu. « J’en tirerai les leçons », a-t-il promis. Il n’y a aucune raison d’en douter.

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