La famille du noble art en deuil – Le légendaire Lahouari Godih tire sa dernière révérence

La famille du noble art oranais et national a appris avec consternation la disparition de Lahouari Godih, ancien et légendaire boxeur surnommé la Terreur des rings. Il s’est éteint à l’âge de 94 ans samedi passé aux USA où il résidait, suite à une longue maladie qui a fini par l’emporter vers sa dernière demeure.
Par Sadek Belkheïr
Cette triste nouvelle s’est répandue comme une traînée de poudre dans les fiefs de toute la famille de la boxe oranaise et de sa ville natale. Le regretté Lahouari Godih était pleinement acquis à la cause de sa discipline de prédilection, la boxe en l’occurrence. Né en 1929 à Oran, il entreprit ses débuts de boxeur en 1950, alors âgé de 21 ans, dans cette même ville d’El Bahia. Dès son entrée en matière, il s’est fortement distingué devant une foule immense aux Nouvelles arènes d’Oran, un lieu mythique où il remporta un tournoi organisé en hommage à Marcel Cerdan. Il quitte Oran en 1951 pour Paris où il vécut jusqu’en 1958, avant d’aller s’installer définitivement aux États-Unis, dans une résidence au Queens, à Manhattan.
A l’apogée de sa carrière, il ne livrera pas moins d’une quinzaine de combats, dans l’antre mythique de la boxe, le ‘’Madison Square Garden’’ de New York. Le regretté Lahouari Godih a disputé pas moins de 120 combats professionnels entre 1951 et 1962, dont certains en Afrique, en Australie, à Londres, Casablanca, Copenhague, Glasgow, Rome et Istanbul. Ce grand monsieur de la boxe, respecté de tous et que tout monde pleure aujourd’hui, racontait à chaque occasion sa vie, donnant ainsi l’impression d’avoir été marqué par les blessures d’une existence partagée entre sa terre natale et celle d’adoption. Tous ses anciens amis et coéquipiers qui l’avaient côtoyé ne tarissent pas d’éloges sur sa personne, tellement c’était un homme brillant et d’une grande affabilité. Il était aussi peiné de voir le noble art tomber aussi bas en Algérie, du fait de certaines personnes qui ont contribué à sa dégringolade. De par ses immenses connaissances, sa sincérité et son franc-parler, le regretté Lahouari Godih était un livre ouvert pour tous ceux qui avaient eu à l’approcher.
Un parcours difficile mais éloquent
Pour Lahouari Godih, la boxe était un sport, mais aussi un moyen de s’extirper de la misère. Il a pris conscience de cela après avoir décroché sa toute première victoire, à l’âge de 16 ans, empochant ainsi quelques misérables francs de l’époque. Il comprit dès lors que la boxe serait aussi un combat et un gagne-pain. A l’âge de 10 ans, après la disparition de sa mère, il sera tour à tour surveillant, porteur au marché d’Oran et cordonnier, pour finir par apprendre les ABC de la boxe entre 1942 et 1945 à Oran, durant la guerre, du côté d’une base américaine où son destin était fixé. Un certain François Constantin, alors entraîneur, va le repérer et lui enfiler les gants pour qu’il se frotte à des boxeurs amateurs, dans des combats organisés pour le compte de l’armée américaine. Et c’est à 13 ans qu’il est pris en charge par le manager François Ibanez, lequel le conduira vers les rings où il ne disputera pas moins de 55 combats, tous remportés d’ailleurs, entre 1946 et 1950. À 17 ans, il est finaliste du championnat d’Oranie. Il devient un grand espoir de la boxe africaine. Champion d’Oranie, d’Algérie, d’Afrique du Nord et finaliste au championnat de France, il est alors surnommé la Terreur du ring. Son séjour à Paris ne passe pas inaperçu, lui qui se met vite sous les projecteurs, dans la salle Wagram à Paris où il deviendra champion de France des poids légers.
Le puncheur algérien deviendra vite une référence et fera la une des journaux. Il gagnera par la suite en notoriété et entamera une autre étape importante de sa carrière. Lors d’une soirée organisée par le journal l’Équipe, il fait la rencontre d’un représentant du Madison Square Garden, George Peter, qui le présente à Lew Burston, chargé des intérêts des boxeurs étrangers aux États-Unis, pour le compte de la International Boxing Championship, pour des propositions de combat aux États-Unis. Le 2 février 1958, il débarque à New York où Il rencontre sa première femme, avec laquelle il aura trois enfants. Il retourne à Oran, après 12 ans d’absence. A 33 ans, Lahouari Godih décide de raccrocher les gants. Il se tourne alors vers une mission de l’Algérie auprès des Nations unies. Une expérience qui lui permettra de rencontrer presque tous les chefs d’État algériens, à l’exception du président Chadli. En 1963, lors des funérailles de John Fitzgerald Kennedy, il rencontre le ministre algérien de la Jeunesse et du Sport de l’époque, Abdelaziz Bouteflika, à New York.
Sous le poids des ans et atteint d’une maladie vers l’âge de 90 ans, il se déplacera souvent en Algérie à son domicile familial, au quartier Maraval où tous ses amis et anciens boxeurs se relayaient pour lui rendre visite.